La commémoration de l’attaque allemande et des combats du Vercors s’est déroulée le 21 juillet à Vassieux-en-Vercors. Elle a été marquée par l’appel à défendre les valeurs de la République. « N’oublions pas que c’est notre incapacité à vivre ensemble qui nous conduit à la guerre », rappelait le maire de Vassieux, Thomas Ottenheimer.
Il y a 80 ans, le 21 juillet 1944, la résistance attendait des parachutistes alliés. A Vassieux, un terrain d’aviation avait été aménagé pour les recevoir. Ce sont des planeurs allemands qui sont apparus dans le ciel. Les combattants, les civils ont été massacrés, le village rasé. L’horreur a atteint l’indicible des guerres.
Ce 21 juillet est depuis la date de la commémoration des combats du Vercors. Avec, à Vassieux, toujours la participation des familles à jamais meurtries. Mais aussi la place faite aux plus jeunes. A la nécropole de Vassieux où se trouvent les tombes et cénotaphes des combattants de la résistance, deux lycéennes du lycée Amblard à Valence ont lu, un extrait du roman de Catherine Ganz-Muller, Au cœur de l’orage. D’autres récits encore, avec les collégiens de la cité scolaire Camille Vernet. Des élèves ont donné lecture du poème de Louis Aragon, La Rose et le réséda.
Car la résistance dans le Vercors transcendait les différences sociales, de religion ou d’opinion. « Quand les blés sont sous la grêle / Fou qui fait le délicat / Fou qui songe à ses querelles / Au coeur du commun combat ». Ce que notait l’allocution de Daniel Huillier, président national de l’Association des pionniers et combattants volontaire du maquis du Vercors, prononcée par Pierre Buisson. Ici à la nécropole, « les victimes, hommes, femmes, enfants, combattants et civils […] ont été rassemblées sans distinction d’origines, d’engagements spirituels, de nationalités, d’orientations politiques ».
Tandis que la pluie menaçait et donnait quelques ondées à deux reprises, les cérémonies se sont poursuivies à Vassieux, devant le martyrologe qui porte les noms des soixante-treize victimes de la barbarie. La plus jeune avait 18 mois, la plus âgée 91 ans.
« Liberté, Égalité, Fraternité, ce ne sont pas seulement trois mots, c’est l’ultime justification du sacrifice de ceux qui reposent ici. Sachons-nous en souvenir », avait lancé Daniel Huillier à la nécropole. Ces valeurs de la République, le maire de Vassieux, Thomas Ottenheimer, en rappelait toute l’actualité. « Parce qu’ici des hommes et des femmes se sont sacrifiés pour nous, parce qu’ici des enfants sont morts, parce que d’autres ont été privés d’enfance, nous devons être à la hauteur et dignes de leur sacrifice et faire nôtre au quotidien leur idéal. Eux se sont battus pour restaurer les valeurs de notre République : Liberté, Egalité, Fraternité. Il nous incombe désormais à nous de les défendre et de les faire vivre », disait-il.
Ce que, précédant l’allocution de Thomas Ottenheimer, avaient souligné à leur manière le témoignage de Monique Jallifier, le récit des familles de victimes, les textes lus par des lycéens.
Mais c’est aussi vers l’avenir de la République que Thomas Ottenheimer tournait ses regards. « Si […] nous sommes toujours au rendez-vous du devoir de mémoire, ayons l’humilité collective de reconnaitre que, depuis 80 ans, nous n’avons pas toujours été et ne sommes pas toujours à la hauteur de nos devoirs de rassemblement, d’apaisement, de fraternité et d’exemplarité. » Et d’expliciter son propos : « N’oublions pas que c’est notre incapacité à vivre ensemble qui nous conduit à la guerre, souvenons-nous que de la colère à la haine et de la haine à la violence il n’y a qu’un pas et souvenons-nous où nous ont menés ceux qui prétendaient, dans un passé pas si lointain, nous rassembler en apaisant nos colères dans le rejet de l’autre. L’autre dont on attend qu’il nous tende la main que nous ne le lui tendons pas ; l’autre dont on voudrait qu’il soit exemplaire alors que nous ne le sommes pas nous-mêmes ; l’autre, celui qui ne prie pas le même dieu que nous, qui n’a pas la même couleur de peau que nous ; l’autre qui ne pense pas comme nous, qui ne mange pas nous ; l’autre que nous méprisons parce qu’il nous méprise ; l’autre qui finalement est assis à côté de nous. »
En écho à ce que disait Daniel Huillier à la nécropole : « la liberté, la démocratie, la tolérance, le respect de l’autre, ces valeurs ne peuvent s’estomper dans notre indifférence, sauf à trahir celles et ceux qui reposent ici ».
Thomas Ottenheimer n’en appelait pas moins à relever le défi : « Oui, nous devons garder foi en l’humanité et nous devons garder confiance en nous. Et nous y arriverons par notre capacité à avancer ensemble dans une confiance retrouvée dans l’Autre. Ce faisant, nous écarterons définitivement le risque de devoir graver nos noms sur un martyrologe et nous pourrons réaffirmer à Monique, Lucien, Emma, Mike, Paul, Gilbert, Robert et tant d’autres, que leurs parents, leurs proches, leurs amis ne sont pas morts pour rien et nous pourrons rassurer Marinette qu’ici à Vassieux plus jamais une petite fille et son papa ne seront privés l’un de l’autre par la folie des hommes ».